Le numérique au service des plus fragiles

L’école Charles-Beuvin A expérimente l’utilisation de tablettes numériques tactiles pour les élèves en classe Clis. Baptisé “Clis’Tab”, ce projet présente de multiples avantages.

 

Photo de l'école Beuvin

 L’école Charles-Beuvin où est menée l’expérimentation “Clis’Tab”.

 

Depuis deux mois, l’école Charles-­Beuvin A conduit une opération pilote. Il s’agit d’expérimenter l’utilisation pédagogique de tablettes numériques dans une Clis * (classe pour l’inclusion scolaire). Cette classe accueille dix élèves âgés de 7 à 12 ans, présentant des troubles cognitifs. Beuvin A est l’une des deux écoles de Créteil avec Léo-Lagrange et des neuf de l’académie à mener cette expérimentation.

 

Le dispositif est simple : l’enseignant (qui a reçu une formation), ainsi que chacun des élèves et assistants de vie scolaire, disposent de leur propre tablette. Par ailleurs, un ordinateur central pilote l’ensemble de la flotte des appareils numériques, avec la possibilité de personnaliser chacune des tablettes selon les besoins éducatifs des élèves.

 

L’intérêt d’un tel dispositif est multiple : favoriser le travail en autonomie, tout en respectant les rythmes d’apprentissage et en permettant la participation des élèves à des travaux collectifs. Très facile d’utilisation avec son interface tactile, la tablette pallie aussi les difficultés de motricité fine (absence de stylo). Enfin, les fonctionnalités d’accessibilité comme la synthèse vocale, l’agrandissement du texte et la simplicité d’utilisation des ressources multiplient les canaux d’apprentissage.

 

Un impact direct sur la motivation des élèves

 

Ainsi, depuis la rentrée, tous observent la rapidité avec laquelle les enfants se sont approprié cet outil. Pour preuve, l’enseignant peut, par exemple, proposer une dictée “Montessori”, qui repose sur une approche sensorielle, ou mener différents projets en classe : création de livres numériques (conte, cahier de chansons), mise en place d’une BD, conception de films d’animation… Ce dispositif semble en plein essor.

 

“ Les premiers retours, certes parcellaires, sont très encourageants , indique Philippe Roederer, inspecteur de l’Éducation nationale rattaché au rectorat de l’académie de Créteil, en charge du numérique éducatif. Nous avons observé un impact très direct sur la motivation des élèves et l’implication des enseignants. La tablette devient peu à peu l’outil de référence, un peu comme l’est un dictionnaire ou un manuel scolaire. L’usage peut être immédiat, comme un appui aux apprentissages, ou bien permettre aux élèves de produire du contenu .”

 

Associer pleinement les parents

 

Un autre atout de Clis’Tab réside dans le fait que l’élève peut apporter la tablette numérique chez lui. L’occasion de poursuivre les activités pédagogiques, mais également d’associer pleinement les parents aux progrès de leur enfant.

 

Ainsi, la mère d’une élève présente lors de la visite du ministre de l’Éducation nationale (voir encadré ci-dessous), a-t-elle pu témoigner des progrès qu’elle constate de jour en jour chez sa fille.

 

De son côté, l’inspecteur de l’Éducation nationale ajoute : “ Le lien famille-école n’est pas toujours facile à tisser. Dans ce contexte, la tablette devient un outil très important, qui permet notamment une meilleure communication entre les parents et le monde scolaire .”

 

Après deux mois d’utilisation, les tablettes numériques semblent donc faire l’unanimité. L’expérimentation est prévue pour durer deux ans.“ C’est le temps qu’il faut pour qu’enseignants, élèves et parents s’approprient le matériel, les contenus et les compétences nécessaires à l’utilisation de ce nouvel outil ”, conclut Philippe Roederer.

 

À l’issue de cette période, un rapport d’expertise sera remis au ministère de l’Éducation nationale. Pour l’heure, cette expérimentation montre que la généralisation des projets numériques à l’école peut avoir un impact pédagogique significatif pour les élèves en situation de handicap.

 

Une approche reconnue, une pédagogie en plein essor Le 2 décembre 2013, à la veille de la Journée internationale des personnes handicapées, la première dame, Valérie Trierweiler, et le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon, sont venus à Créteil à l’école Charles-Beuvin A pour y rencontrer les dix élèves de la Clis. Lors de leur visite, ils ont pu observer les premiers résultats et la rapidité avec laquelle les enfants se sont approprié les tablettes numériques. “ Cette expérimentation concerne un peu plus d’une centaine d’élèves aujourd’hui en France. Elle est au début de sa mise en application, mais, déjà, les premiers résultats et ce que nous constatons, nous font penser qu’il faudra la généraliser ”, a indiqué le ministre de l’Éducation nationale, soulignant combien la France a du retard dans l’utilisation des outils numériques.

 

* Ces classes sont intégrées à l’école. Les élèves orientés en Clis bénéficient d’une pédagogie particulière, adaptée à leurs besoins. Les Clis 1 sont destinées aux élèves en situation de handicap mental et cognitif (autistes, porteurs de trisomie 21 ou de troubles mentaux et cognitifs). En 2012-2013, les Clis 1, qui ont accueilli plus de 43 000 élèves, représentaient 95% des effectifs de Clis (4099 classes).

 

Article de Créteil, Vivre Ensemble, janvier 2014 - n°338