Music of My Life de Gurinder Chadha
Pour sa 38e édition, du 19 novembre au 3 décembre 2019, le festival départemental L’œil vers… choisit l’Outre-Manche, la conduite à gauche et le non-sens comme fils conducteurs. À Créteil, une quinzaine de films vont débarquer au cinéma La Lucarne.
Comment va le cinéma de notre voisin qui s’apprête à quitter l’Union européenne ? Il se caractérise par une grande diversité qui témoigne autant de ses interrogations sociétales et de sa longue tradition d’art dramatique que de son appétit pour les genres populaires. Le cinéma britannique couvre un large éventail de genres, de contenus et de styles. À Créteil, dans le programme concocté par le cinéma La Lucarne, les thèmes de la filiation, de la musique et de l’humour seront à l’honneur.
Des luttes sociales à la satire
Mention spéciale est faite à l’année 1968 et ses mouvements politiques et sociaux, notamment à travers le film-essai de Peter Brook, Tell Me Lies, alliant le discours politique en réaction à la guerre du Vietnam à l’expérimentation visuelle. 1968 aussi avec la comédie dramatique We Want Sex Equality de Nigel Cole sur la lutte sociale des femmes. Les années Tchatcher (1980) sont restituées à travers l’immigration pakistanaise et la création musicale. Du côté du cinéma d’animation, le rétro s’invite avec So British !, des courts métrages de John Halas et Joy Batchelor, figures majeures du genre dans les années 1950-1960.
Tell Me Lies de Peter Brook
Le cinéma britannique témoigne aussi d’une dimension internationale. Les salariés de We Want Sex Equality ou de Locke de Steven Knight travaillent en Angleterre pour des filiales de sociétés américaines. Music of My Life de Gurinder Chadha évoque, par le biais de la figure de Bruce Springsteen, le lien culturel très fort de l’Angleterre avec les États-Unis. La lutte contre la guerre du Vietnam rassemble la jeunesse britannique de l’époque et voit l’émergence de ce qu’on a appelé le tiers-mondisme. Plus près de nous, la conscience écologique actuelle s’affirme dans une dimension planétaire avec Trashed de Candida Brady.
Locke de Steven Knight
De nombreux films reflètent les problématiques sociétales et mettent en scène des conflits entre des forces progressistes et des forces conservatrices comme les thrillers Les Poings contre les murs de David Mackenzie ou Locke. La comédie musicale joue sa carte avec Music of My Life, l’aventure avec Le Géant égoïste de Clio Barnard, le genre littéraire comme le drame familial intimiste avec Sorry We Missed You de Ken Loach, Lilting ou la délicatesse de Hong Khaou, Seule la terre de Francis Lee, ou encore la satire, grande tradition culturelle britannique, avec The Party de Sally Potter.
The Party de Sally Potter
La filiation et la confrontation des générations
Le thème central qui traverse l’essentiel de la programmation est celui de la filiation et de la confrontation entre les générations. La quête des personnages de Seule la terre, Music of My Life, Lilting ou la délicatesse, Les Poings contre les murs, Locke et Mango de Trevor Hardy consiste à briser le modèle parental. Les drames sociaux montrent aussi comment les conditions subies par les personnages affectent les relations parents/enfants et l’éducation (Le Géant égoïste, Sorry We Missed You). Un autre thème récurrent est l’opposition entre brutalité et violence d’une part, et délicatesse, nuance et sensibilité d’autre part. Le cinéma britannique sait tenir en haleine le spectateur à partir d’éléments simples : peu de lieux, voire le huis clos complet d’un salon dans The Party. Peu de personnages, peu de thèmes, mais une articulation dramatique qui fait apparaître la complexité et le vertige des situations, résurgence d’une longue tradition du théâtre anglais qui a pour ADN d’accentuer l’intensité dramatique à partir d’un nombre restreint d’éléments.
Les Poings contre les murs de David Mackenzie
Autre aspect de ce cinéma : une palette de couleurs très travaillée. Pastel, flashy, chaude, froide et lumineuse, froide et obscure, ocrée, nocturne, etc. Palettes très étudiées auxquelles s’ajoutent des effets de grains qui font ressentir l’humidité glaçante du brouillard du Géant égoïste ou la moiteur et la “poisseur” des Poings contre les murs. Le noir et blanc de The Party accentue, quant à lui, la distance et la perfection de l’intrigue. Enfin, on ne saurait quitter ce panorama du cinéma anglais sans évoquer l’humour, qui s’exprime notamment à travers le flegme des personnages et le double sens, omniprésents dans les films d’animation.
Les soirées exceptionnelles à La Lucarne
Dimanche 24 novembre 2019
- 18h : Les Poings contre les murs [David Mackenzie]. Projection suivie d’un débat avec Charlotte Garson, critique de cinéma à France Culture.
Mardi 26 novembre 2019
- 20h30 : “Le cri de la boîte”, improvisation théâtrale sur le thème du speakers’corner (coin des orateurs) de Hyde Park par les comédiens des ateliers de la MJC du Mont-Mesly animés par Denis Morin. Suivra la projection de Tell Me Lies [Peter Brook].
Vendredi 29 novembre 2019
- 20h30 : We Want Sex Equality [Nigel Cole]. Projection suivie d’un débat avec Michel Miné, membre du comité central de la Ligue des Droits de l’Homme, spécialiste des questions droit du travail et égalité.
We Want Sex Equality de Nigel Cole
Samedi 30 novembre 2019
- 14h30 : So British ! [John Halas et Joy Batchelor]. Projection suivie, d’un petit concert par les jeunes musiciens des ateliers de la MJC du Mont-Mesly animés par Marie Cali et d’un goûter. Pour tous à partir de 3 ans.
- 16h : projection du programme So British 2. Pour tous à partir de 5 ans.
So British ! de John Halas et Joy Batchelor
Mardi 3 décembre 2019
- 20h30 : Sorry We Missed You [Ken Loach]. Projection suivie d’un débat autour du Brexit avec Nora Hamadi, journaliste, spécialiste de l’Europe.
Sorry We Missed You de Ken Loach
L’œil vers… l’Angleterre
Du 19 novembre au 3 décembre 2019 au cinéma La Lucarne [MJC du Mont-Mesly, 100, rue Juliette Savar]
Contact : 01 45 13 17 00 ou www.mjccreteil.com