Signée en 1989, la Charte Handicap de la Ville de Créteil constitue, depuis trente ans, le cadre de référence de son action en faveur des personnes en situation de handicap. Le texte, corédigé avec les associations, traduit l’engagement de la Ville à mettre en œuvre une politique volontariste afin de répondre aux besoins des Cristoliens concernés.

 

La culture d’intégration des citoyens en situation de handicap est apparue dès 1977, quand la Ville de Créteil a mis en place un atelier public d’urbanisme et qu’un travail a été entrepris, en partenariat avec les associations (APF, Apajh, Adapei…), pour développer le droit d’accès à la ville et fixer les normes d’accessibilité dans les nouvelles constructions. Des dispositifs mis en place à l’époque à Créteil, notamment pour l’intégration dans les écoles et les centres de vacances, ont d’ailleurs servi de modèle à Michel Gillibert (secrétaire d’État aux personnes handicapées de 1988 à 1991) pour l’instauration de politiques nationales. La ratification, en 1989, de la “Charte des villes de France pour l’intégration de leurs citoyens handicapés”, puis la création de la Commission pour l’intégration des personnes handicapées (CIPH), en 1991, ont donné une nouvelle impulsion à ce travail de partenariat qui s’est construit, étape par étape. La Charte prend en compte l’ensemble des aspects de la vie tels que le transport, l’éducation, le travail, le logement, la citoyenneté, la vie sociale… Autant de droits pour lesquels de nombreux acteurs œuvrent au quotidien.

 

 

Adapter le domaine public

 

Le groupe de travail “Urbanisme, travaux et accessibilité” de la CIPH dispose d’un crédit annuel de 55 000 €. À cela s’ajoutent les contributions du budget de la Ville ainsi qu’une partie de l’enveloppe budgétaire des conseils de quartier. Des critères d’attribution sont appliqués par ordre de priorité. En premier lieu sont traitées les demandes individuelles des personnes handicapées qui rencontrent des difficultés dans leur quotidien, viennent ensuite les suggestions des associations transmises à la CIPH puis celles des différents services municipaux. La Ville intervient sur le domaine public. Elle établit la faisabilité concernant la matérialisation de places de stationnement, effectue des visites régulières sur site. Sur le domaine privé, des échanges se créent avec les interlocuteurs concernés pour agir sur la voirie (places de stationnement, abaissement de trottoirs…).

 

La Ville travaille aussi régulièrement avec des opérateurs tels que la RATP ou les services de transports régionaux pour améliorer l’accessibilité sur son territoire. S’agissant du cadre de vie, tous les projets de renouvellement urbain, les grands projets structurants des quartiers sont l’occasion d’effectuer une remise aux normes de l’environnement (trottoirs, cheminements, accès aux écoles…). Tous les travaux sur voirie sont programmés dans le cadre de l’élaboration du Plan de mise en accessibilité de la voirie et des aménagements des espaces publics (Pave). La mise aux normes de l’ensemble du patrimoine communal est également programmée sur plusieurs années et évaluée à sept millions d’euros.

 

 

Accéder à l’emploi

 

La loi de 2005 oblige les collectivités territoriales à embaucher au moins 6% de leur personnel parmi des personnes handicapées. La Ville de Créteil et le CCAS ont toujours appliqué un taux supérieur, cet engagement étant pleinement ancré dans la politique des Ressources humaines de la Ville. De plus, la collectivité met régulièrement en place des formations liées au handicap à destination de son personnel. Enfin, un travail en étroite collaboration avec des structures telles que Cap Emploi a pour but de faciliter l’intégration des personnes handicapées. Sans oublier la présence, sur le territoire communal, de deux Esat (Établissement et service d’aide par le travail).

 

 

Un logement autonome

 

Autre facteur très important, avoir un chez-soi. L’accès au logement, en effet, est essentiel pour l’autonomie des personnes handicapées. En relation avec les différents bailleurs sociaux, le service Logement de la Ville veille à des attributions régulières de logements adaptés aux personnes handicapées malgré une très forte demande générale et de nombreuses campagnes de relogements. Le parc immobilier est sans cesse évalué lors des changements de locataires. Par ailleurs, la Ville s’engage à soutenir les familles touchées par un handicap psychique face aux éventuels contentieux locatifs ou aux expulsions.

 

 

Petite enfance et scolarité

 

Le secteur de l’éducation n’est pas en reste. Dès la crèche, une attention particulière est portée aux enfants atteints de handicap. Des dérogations sont ainsi mises en place afin de permettre le maintien des enfants au-delà de 3 ans, encadrés par des agents qualifiés. Une commission a également été créée pour l’intégration des enfants handicapés dans les accueils de loisirs. Chaque année, 100 000 € sont alloués au recrutement d’animateurs supplémentaires et de personnel de cantine.

 

À cela s’ajoute la mise à disposition d’auxiliaires de vie scolaire par l’Éducation nationale pour accompagner les enfants autistes ou présentant toute forme de handicap évaluée par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées). Une campagne de sensibilisation au handicap est menée auprès des enfants tout au long de l’année scolaire au sein des établissements. Enfin, il faut mentionner l’opération “Vis ta différence”, organisée, lors des vacances scolaires, par la direction de la Jeunesse et de nombreuses associations (APF France handicap, Les Aveugles de Créteil…). Celle-ci permet de promouvoir, notamment, des activités physiques adaptées pour sensibiliser les plus jeunes à la thématique du handicap, l’objectif final étant l’intégration de tous.

 

 

Convivialité, prévention, santé mentale

 

À Créteil, tout est mis en œuvre pour que chacun vive des moments de convivialité. Lors de chaque événement, comme Jour de fête, un ensemble d’actions sont menées afin que les personnes handicapées bénéficient des meilleures conditions pour profiter pleinement des animations : organisation spécifique, moyens à mobiliser, placements adéquats, accompagnants nécessaires. Une sensibilisation aux handicaps invisibles est également assurée afin d’informer la population sur les risques encourus au quotidien comme, par exemple, le fait d’écouter de la musique à un volume élevé. Autre initiative plus récente, la Ville a mis en place un Conseil local de santé mentale en lien avec l’association Unafam. Il s’agit d’un espace de concertation et de coordination entre les services publics de psychiatrie, les usagers, aidants, associations, intervenants sociaux, professionnels de santé, élus et tous les acteurs concernés de près ou de loin par la santé mentale.

 

Développer l’information

 

Le droit à l’information, élément fondamental, est servi par toute une série de dispositions. Ainsi, le magazine municipal, Créteil Vivre Ensemble, est accessible aux personnes déficientes visuelles sur le site internet de la Ville. Le Guide pour la personne handicapée et sa famille, édité par la Ville en 1989, est également disponible en version audio, enregistrée dans les studios de la MPT de la Haye-aux-Moines. La Mission Handicap, quant à elle, assure une mise à jour des différentes publications de la Ville en fonction de l’actualité et des besoins exprimés par les associations et les différents partenaires.

 

Gilles Lebreton
Ancien président de l’Association des Aveugles de Créteil.

“J’ai impulsé l’idée de rendre le journal Créteil Vivre Ensemble accessible en 2010 et, grâce à la réactivité et la sensibilité de la Ville de Créteil, ce service a été mis en place très rapidement. Ce système «DAISY» permet de structurer le texte et ainsi permettre une certaine souplesse de lecture vocale ou en braille. C’est un projet très abouti qui, je l’espère, inspirera de nombreuses institutions.”

 

 

 

 

Béatrice Barbier

Présidente de l’Association Itinéraires et Rencontres.

“L’Association Itinéraires et Rencontres, spécialisée dans l’accompagnement du handicap psychique, met en place des activités, des sorties, des spectacles. Elle accueille les personnes présentant un handicap psychique afin de leur proposer des activités et des ateliers créatifs. Une sortie culturelle est organisée, chaque mois, ainsi que la visite d’un château, chaque année. Cela leur permet de se réinsérer dans la société souvent après une longue hospitalisation.”

 

 

 

Françoise Leloup

Présidente et fondatrice de l’Apajh 94 et fondatrice de l’IME Françoise Leloup. Pionnière en matière d’actions en faveur du handicap depuis 1962.

“Sensibilisée au handicap dans mon environnement familial ainsi qu’auprès d’Yvette Savignat, lors de ma collaboration à l’ouverture du deuxième groupe scolaire du Mont-Mesly, j’ai désiré servir cette cause tout au long de ma vie. L’Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh) se mettant en place au niveau national, j’ai souhaité créer une antenne locale au niveau du département. J’ai ensuite ouvert l’IMP des Buttes en 1965, institut médico-pédagogique spécialisé pour les enfants jusqu’à 14 ans, composé d’enseignants, de médecins et d’éducateurs spécialisés. L’IMP a dû déménager en 2004 du fait de l’état vétuste de ses locaux et, grâce au soutien de Laurent Cathala, un nouveau terrain, rue de Saussure, a pu être utilisé pour reconstruire la structure devenue institut médico-éducatif (IME).

 

La configuration a quelque peu changé du fait de la création d’une section médico-professionnelle et d’une section d’accompagnement pour aider les enfants à retrouver un milieu scolaire dit «normal». La Charte Handicap a 30 ans. Que de chemin parcouru ! La politique en faveur du handicap s’est bien diversifiée et a permis d’intégrer pleinement les personnes handicapées dans la vie de la cité. À l’époque, le handicap suscitait beaucoup d’appréhensions et il y avait une certaine mise à l’écart. Aujourd’hui, le handicap s’exprime partout et fait partie intégrante de la vie quotidienne. Les techniques ont bien évolué grâce aux moyens modernes des associations qui l’accompagnent. Il reste des maladies dites «orphelines» que l’on découvre encore et qui sont difficiles à prendre en charge, mais la recherche avance quand même bien, malgré les difficultés économiques que nous traversons.”

 

 

Jean-Marc Alric

 

Représentant départemental en charge de l’accessibilité de l’association APF France Handicap depuis 2008.

“L’événement Vis ta différence est un grand moment de sensibilisation. Notre association met en place un parcours fauteuil au sein du gymnase Dassibat afin de sensibiliser les enfants au handicap moteur, en lien avec les agents du service Prévention-Sécurité de la Ville qui en profitent pour décrire les conséquences des incivilités sur la voie publique. Nous proposons également un atelier quizz ainsi que la projection d’un film. Notre action est également continue au sein des écoles et des accueils de loisirs.”

 

Article de Créteil, Vivre Ensemble, mars 2019 n°390