Danse « Don Quichotte du Trocadéro »

photo du spectacle don quichotte

© Patrick Berger

Antidépresseur de pointe

Fort du succès de sa pièce, José Montalvo reprend à Créteil Don Quichotte du Trocadéro, une adaptation joyeuse et métissée d’un grand mythe littéraire et chorégraphique, entre hommage et dérision.

 

Depuis vingt ans, José Montalvo ne cesse d’innover et de nous surprendre. Le chorégraphe, qui a fait du mélange des genres sa marque de fabrique, renouvelle l’expérience en revisitant le Don Quichotte de Cervantès et le ballet classique qui s’en était inspiré, chorégraphié par Marius Petipa à Saint-Pétersbourg, en 1869. Mais la vision de cette Espagne du Siècle d’or par des artistes de l’Europe de l’Est du XIXe siècle ne peut être la même que celle du chorégraphe, lui-même d’origine espagnole. José Montalvo dépoussière les classiques de façon ludique et inventive, en procédant par détournement, association et décalage.

 

“Tout est parti d’une conversation amicale et passionnée avec le comédien Patrice Thibaud sur les différences et les similitudes entre le comique de gestes burlesque et la danse, raconte José Montalvo, ancien directeur du Centre chorégraphique national de Créteil et artiste associé au Théâtre de Chaillot. Très vite est né le désir de confronter ces deux pratiques dans une même œuvre. La question qui se posait était de trouver une œuvre suffisamment souple, ouverte, mais aussi solide pour être autre chose qu’un pur prétexte. Don Quichotte nous est apparu comme une évidence : c’est le premier grand roman moderne qui trempe sa plume dans l’encre du burlesque.”

 

photo du spectacle de José Montalvo

© Patrick Berger 

 

La pièce est portée par 13 danseurs, issus de tous horizons, et par le comédien Patrick Thibaud, qui incarne le chevalier errant. Poète et acrobate, il campe un hidalgo de la Mancha cocasse et attachant, comme savent le faire les grands artistes comiques, dans la veine d’un Louis de Funès ou celle d’un Jacques Tati. Comme à son habitude, le chorégraphe mêle les pirouettes et jetés traditionnels à des chorégraphies plus contemporaines empruntées à différents répertoires, des danses traditionnelles africaines au tango ou au flamenco, du hip-hop à ses formes dérivées.

 

La création s’est déroulée en deux temps : d’abord la transmission aux danseurs de certains extraits du ballet par Carole Arbo, danseuse étoile et professeur de l’Opéra de Paris, puis l’appropriation très personnelle par les interprètes de la pièce, selon leur pratique chorégraphique. La musique originale de Minkus est confiée à Sayem, arrangeur et compositeur inspiré par le hip-hop et l’électro.

 

Dans cette épopée, qui mène des rames de métro aux moulins à vent de la Mancha, région au sud de Madrid, José Montalvo s’appuie également sur une équipe de techniciens qui manient avec brio l’image, la vidéo, l’infographie et le son.

 

Film, incrustations, jeux avec les cadres et les échelles, interaction entre l’image et le corps, les images projetées permettent de danser sur le dos d’animaux, de se multiplier à l’infini, d’être ici ou ailleurs, d’oublier les lois de la gravitation. En créant ce plaidoyer pour un art du mélange des pratiques corporelles, le chorégraphe signe ici une déclaration d’amour à la danse, qu’il considère comme un antidépresseur de pointe.